Trente ans de politique de l’enfant unique en Chine
Le 25 septembre 1980 entrait en vigueur dans la Chine communiste la politique draconienne de l’enfant unique. Trente ans plus tard, le pays le plus peuplé du monde vieillit vite et tente d’assouplir le contrôle des naissances.
Sans lui, la population chinoise, de 1,3 milliard d’habitants, compterait 400 millions d’âmes en plus aujourd’hui, selon la Commission nationale du planning familial.
C’est dire si cet interventionnisme coercitif a façonné la société actuelle, avec des foyers dans une configuration “4-2-1” fréquente, c’est-à-dire qu’un enfant unique cohabite avec ses deux parents et ses quatre grands-parents.
Han Mei est l’une des nombreuses femmes chinoises à avoir subi les risques et les sanctions imposés par cette politique.
Pour son premier enfant, une fille, cette enseignante retraitée aujourd’hui a eu droit à un congé de maternité, payé par son entreprise, un mois avant la naissance.
Mais, quand Han Mei a été de nouveau enceinte, elle s’est trouvée exposée à une amende astronomique, une pénalité salariale, voire la perte de son emploi.
Obligée de cacher sa grossesse, elle a travaillé jusqu’à son accouchement, puis payé de sa poche la césarienne nécessaire pour donner le jour à son fils.
Ensuite, il lui a fallu dissimuler aux autorités l’existence de son second enfant, ce qu’elle est parvenue à faire grâce au soutien des habitants de son village.
“Quiconque mettait au monde de façon illégale un second enfant était puni, et les peines pouvaient être le renvoi de l’école, une réduction de salaire ou une amende”, relate Han Mei, dont l’identité a été modifiée pour sa protection.
“Si vous n’aviez pas de quoi payer l’amende, votre maison était démolie ou les meubles et l’électroménager étaient saisis par les responsables du planning familial”, poursuit la mère âgée de 50 ans.
La politique de contrôle des naissances en Chine a engendré plus de 90 millions d’enfants uniques, souvent appelés “petits empereurs” car très gâtés.
Elle a été assouplie pour les paysans autorisés à avoir un deuxième enfant si le premier est une fille, ainsi que pour les couples dont le mari et la femme sont enfants uniques.
Enfin, la majorité des minorités ethniques chinoises (moins de 10% de la population) sont exemptées.
Alors que la Chine vieillit, les autorités envisagent de nouveaux assouplissement l’an prochain, un expert en contact avec les démographes officiels.
Dans cinq province chinoises – Heilongjiang, Jilin et Liaoning dans le nord-est, Jiangsu et Zhejiang à l’est – les couples dont l’un des deux membres est enfant unique seraient autorisés à avoir deux enfants. A Shanghai aussi.
La nouvelle tolérance pourrait être étendue au reste de la Chine dans les cinq années prochaines, a ajouté M. He.
“Il y a eu beaucoup d’atrocités commises dans le processus d’application de la politique de l’enfant unique”, a-t-il rappelé.
Le 9 septembre dernier a été libéré de prison un militant chinois aveugle, Chen Guangcheng, célèbre pour sa dénonciation de stérilisations imposées de milliers de femmes et d’avortements tardifs et forcés dans son district du Shandong (est), concernant parfois des foetus de huit mois.
Le contrôle des naissances a par ailleurs été rendu responsable du déséquilibre des sexes : il y a aujourd’hui 119 bébés garçons pour 100 bébés de sexe féminin, selon la Commission du planning familial.
Les foyers ruraux tendent à privilégier un enfant de sexe masculin, pour des raisons ancestrales et pour le soutien de la famille, ce qui entraîne des avortements sélectifs (favorisés par les échographies) et des meurtres en série de petites filles.